
© Juozas Cernius/Save the Children
Par Stuart Gillespie, IFPRI
Des données de haute qualité, exécutables s’adressant aux problèmes pertinents et disponibles en temps opportun sont indispensables pour matérialiser l’engagement de faire de la nutrition une problématique de portée nationale. Sans de telles données, nous travaillons au meilleur des cas dans le flou et à l’aveuglette dans le pire. Ces données sont nécessaires pour établir les caractéristiques des différents types de problèmes nutritionnels, et pour mettre en lumière leur ordre de grandeur, leur distribution et leur variabilité dans le temps et dans l’espace. Elles permettent de comprendre leur origine, et de concevoir, mettre en œuvre et suivre des interventions ciblées et en déterminer l’efficacité pour effectuer une veille des niveaux et profils de ces problèmes aux niveaux national et mondial. Ces données sont nécessaires pour obliger les différents acteurs responsables à rendre compte des progrès ou du manque de progrès dans la réalisation des objectifs sur lesquels ils se sont engagés.
Dans ce document, nous faisons valoir qu’une approche de chaînes de valeur est essentielle au progrès. Dans un premier temps, nous examinons les recommandations relatives à un ensemble d’interventions de nutrition très efficaces. Nous avons combiné les recommandations les plus prometteuses de la série d’articles du The Lancet de 2013 sur la nutrition maternelle et infantile avec les directives mondiales actuelles de l’OMS pour établir une liste de 24 interventions considérées comme très efficaces. Nous avons ensuite proposé une liste d’indicateurs pour saisir leur couverture et évaluer leur faisabilité en utilisant les banques de données disponibles. Nous présentons ensuite trois études de cas pour mettre en lumière les types d’innovation faisables, en utilisant la littérature publiée et les données empiriques provenant d’initiatives à grande échelle.
Ce document fait partie d’une série provenant de l’initiative Compte à rebours 2030 qui a pour objectif de définir les défis en matière de mesures et de suivi de la santé des femmes, des enfants et des adolescents dans le contexte des objectifs de développement durable. Cette série comprend des moyens améliorés pour mesurer et suivre des inégalités, les facteurs de la santé des femmes, des enfants et des adolescents, en particulier la gouvernance, le développement de la petite enfance, la santé reproductive, maternelle et infantile dans des situations de conflits, la couverture des interventions de nutrition et la couverture effective de ces interventions.
Que faut-il pour faire progresser le programme de mesures de la couverture des interventions de nutrition?
- Un processus susceptible de dégager un consensus mondial sur un ensemble minimum d’indicateurs de couverture validés sur des interventions de nutrition dont l’efficacité a été démontrée ;
- L’inclusion de conseils d’utilisation des mesures et indicateurs de couverture dans les recommandations d’interventions et les documents d’orientation de l’OMS ;
- L’intégration de ces indicateurs dans les mécanismes de collecte de données (par le truchement de révision des questionnaires d’enquête et des systèmes d’information de routine sur la nutrition et la santé) ainsi que dans les plates-formes de mise en œuvre d’interventions pertinentes.
- Un programme d’amélioration continue de l’évaluation des progrès y compris la validation des indicateurs et les moyens d’ajuster les estimations de couverture pour prendre en compte la qualité et l’efficacité de la mise en œuvre (couverture effective) ;
Plus généralement, nous faisons valoir que pour accélérer les progrès en matière de réalisation des objectifs de développement durable, nous avons besoin de ce qui suit :
- L’adoption d’une approche de chaînes des valeurs pour les données, qui considère l’écosystème dans son entièreté, et qui comprend un ensemble intégré et interopérable de matériel, logiciel, données, personne et procédures susceptibles de produire des données pertinentes et de traduire ces données en informations utiles, et (par le biais de la communication) en amélioration des connaissances nécessaires à l’action.
- Des mécanismes nationaux pour l’établissement des priorités et la coordination de la collecte et l’utilisation de données de qualité et disponibles en temps opportun.
- Un encadrement opérationnel pour l’affectation de priorité aux données, l’harmonisation des indicateurs et une intégration cohérente de la nutrition dans les systèmes usuels d’information de gestion.
- Le développement de plans nationaux pour les données, correctement chiffrées, pourvus de ressources adéquates et mis en œuvre sur le long terme (y compris le financement pour la mise à jour et l’entretien des banques de données nationales et mondiales).
- Des études de mise en œuvre, des innovations et de l’apprentissage sur l’ensemble de la chaîne de valeur de données.
- Un renforcement d’un environnement favorisant une culture pour l’utilisation de données factuelles et probantes en vue de la planification et de l’action. Ces données doivent être communiquées de façon persuasive aux responsables de politiques et gestionnaires de programmes de telle façon qu’elles facilitent l’action. Des environnements politiques et institutionnels favorables devront également être créés pour renforcer les engagements, la gouvernance, les compétences et le leadership à tous les niveaux.
- La saisie et la dissémination des connaissances tacites et tirées de l’expérience (par exemple, « des anecdotes relatives à la révolution des données ») en vue d’informer le changement, mais aussi de l’inspirer.