L’obésité et les maladies d’origine nutritionnelle sont en augmentation au Ghana, en particulier dans les zones urbaines. À travers notre travail de recherche, nous avons cherché à comprendre les causes de cette augmentation et à identifier ce que les communautés et le gouvernement peuvent faire pour inverser cette tendance et améliorer la santé. Notre recherche a porté sur trois principaux domaines : les personnes dans leurs communautés, les quartiers et les communautés, et les priorités d’action nationale. Nos études ont porté sur des adolescents et des adultes vivant à Accra (James Town) et à Ho (Ho-Dome).
Les personnes dans leurs communautés
Nous voulions savoir ce que les Ghanéens mangent, à quelle fréquence, où et avec qui ils mangent. Nous avons mené des entretiens individuels avec des personnes âgées de 13 ans et plus. Nous leur avons demandé de se rappeler de : tous les aliments et boissons consommés chez eux/à l’extérieur au cours des 24 heures précédentes, l’heure de la journée à laquelle ils mangeaient/buvaient, combien de temps il leur avait fallu pour manger/boire, où et avec qui ils avaient bu/mangé.
La plupart des gens consomment trois repas par jour, qui sont consommés rapidement (moins de 30 minutes). Davantage d’aliments malsains et de boissons sucrées étaient plus souvent consommés pendant les repas rapides, et étaient généralement consommés le matin, à l’école et sur le lieu de travail. La plupart des repas étaient pris en famille à la maison ; les repas étaient consommés moins fréquemment à l’extérieur, mais l’étaient souvent avec des amis ou seul.
Quartiers et communautés
Nous voulions déterminer comment les quartiers et les personnes qui en font partie influencent les choix alimentaires au quotidien. Nous avons donné des appareils photo aux résidents et leur avons demandé de prendre des photos : des endroits où ils mangent, des choses qui influencent ce qu’ils mangent dans leur quartier, d’une personne qui influence ce qu’ils mangent, des choses qui font que manger sainement est facile ou difficile pour eux.
Facteurs dans l’environnement physique influençant les comportements alimentaires
L’hygiène alimentaire était un facteur important s’agissant du choix du lieu de restauration.
« Ils s’occupent très bien de cet endroit. Ils vendent dans le caniveau mais, quand ils arrivent, ils nettoient très bien avant de vendre. Ils ont un couvercle en verre sur toute leur nourriture et l’endroit où s’asseoir pour manger sur place est très soigné. Il y a du savon pour se laver les mains. Quand on mange, on apprécie, même si la nourriture n’est pas toujours très bonne, on l’apprécie parce que l’endroit est entretenu. La propreté de l’endroit me donne envie de manger là-bas. » (Adolescente de 15 à 18 ans, SSE inférieur, Ho)
L’hygiène environnementale était une considération clé.
« Comme vous pouvez le voir, l’endroit n’est pas soigné… si vous cuisinez dans un endroit comme celui-ci et vous voulez vendre, je n’achèterai pas de nourriture à manger. C’est pourquoi j’ai pris cette photo. Comme vous pouvez le voir sur cette photo, il y a des chiffons sales sur le sol et des ordures un peu partout. Vous pouvez également voir un sac rempli de sachets d’eau vides. » (Femme adulte de 19 à 49 ans, SSE inférieur, mère allaitante, Accra)
Le frelatage des aliments par les vendeurs de rue était une préoccupation commune.
« Certains vendeurs de nourriture vont également acheter des aliments pourris et avariés à cuisiner. J’ai vu au moulin des tomates pourries, du poivron et des oignons, dans un récipient recouvert d’asticots, en train d’être broyés pour préparer des aliments que les gens pourront acheter et manger. C’est ce qui se passe dans les grands marchés comme Makola, alors je préfère cuisiner à la maison pour éviter tout ça. » (Homme adulte, plus de 50 ans, SSE inférieur, Accra)
L’accès financier était un obstacle à une alimentation équilibrée.
« Quand vous avez [de l’argent], vous pouvez acheter quelque chose à cuisiner à la maison et quand vous le faites, il y a un effet sur la santé. Mais si vous n’avez pas d’argent et que vous allez acheter quelque chose au bord de la route… les gens ne s’occupent pas de la façon dont ils préparent leur nourriture, vous pouvez tomber malade quand vous mangez. Ainsi, lorsque vous avez de l’argent, que vous achetez des aliments à cuisiner à la maison, vous n’aurez plus à vous soucier de votre santé. Donc, il faut de l’argent, partout. » (Femme adulte, 19 à 49 ans, SSE inférieur, mère allaitante, Ho)
Les membres de la communauté influencent les comportements alimentaires.
Être responsable de la cuisine
« C’est une photo de ma mère… ce qu’elle cuisine à la maison, c’est ce que je mange à la maison. Elle fait très attention à ce que nous mangeons à cause de mon petit frère, donc elle cuisine ce qui est bon pour nous pour que nous soyons forts car, au bout du compte, si nous sommes malades, elle finira par dépenser plus d’argent à l’hôpital. Donc, pour éviter ça, elle nous donne de la bonne nourriture, en sélectionnant les bons nutriments. » (Femme adulte, 19-49 ans, SSE moyen-inférieur, Accra)
Suivre les préférences et les besoins alimentaires de la famille
« C’est pour eux que je mange beaucoup ou que je mange sainement, pour avoir plus de lait maternel pour les nourrir. Parce que si je ne mange pas beaucoup ou si je ne mange pas d’aliments sains, ils n’auront pas le lait maternel dont ils ont besoin pour bien grandir… » (Femme adulte, 19-49 ans, SSE moyen-inférieur, mère allaitante, Ho)
Les amis se rassemblent pour manger/cuisiner et ont des pratiques établies
« Sur la photo, vous pouvez voir du banku et mes potes, ce qui montre que nous sommes sur le point de manger. Nous mangeons normalement cette nourriture avec les gars, parfois tous les mardis ou vendredis. » (Homme adulte, 19-49 ans, SSE moyen-inférieur, Accra)
Nous voulions également décrire les aliments vendus et proposés à James Town et à Ho Dome. Nous avons mené une enquête auprès des points de vente alimentaire et avons enregistré le type d’établissement, les articles vendus, l’existence ou non de publicité et la nature de celle-ci.
Les vendeurs informels (kiosques, vendeurs locaux, stands) vendant des aliments pauvres en nutriments à forte densité énergétique étaient plus fréquents à James Town, les magasins étant plus fréquents à Ho Dome. Les aliments séchés et transformés et les boissons sucrées étaient largement disponibles dans les deux régions. Entre 25 % et 39 % de tous les points de vente contenaient au moins une annonce publicitaire, le plus souvent pour les boissons sucrées et l’alcool. La réglementation de la publicité semble importante pour la promotion d’une alimentation saine, en particulier dans les points de vente plus formels.
Pour déterminer dans quelle mesure ces communautés étaient prêtes à réduire leur consommation de nourriture et de boissons malsaines, nous avons interrogé des membres et des dirigeants de la communauté. Ce processus a révélé que les membres de la communauté avaient une connaissance limitée et des idées reçues sur les problèmes de santé liés à l’alimentation dans la communauté. Il y avait également une connaissance limitée de ce qui était fait au niveau local pour remédier à ces problèmes et des ressources disponibles pour y faire face. Bien que la consommation de nourriture et de boissons malsaines suscite des inquiétudes, cela ne suffit pas à motiver les membres de la communauté à agir.
Priorités d’action nationale
Nous voulions comprendre ce que les experts nationaux ghanéens considèrent être les stratégies prioritaires pour le gouvernement afin de répondre à ces problèmes. Nous avons utilisé le « Healthy Food Environment Policy Index » (indice de mesure des politiques relatives à la promotion d’un environnement alimentaire sain) pour déterminer la situation du Ghana par rapport à la mise en œuvre de stratégies fondées sur des données probantes pour lutter contre les maladies d’origine alimentaire. Dix-neuf experts ont évalué l’étendue de l’action gouvernementale, proposé et hiérarchisé les actions pour améliorer l’environnement alimentaire.
Les actions politiques jugées importantes et réalisables sont les suivantes : législation et réglementation de la promotion/du parrainage/de la publicité alimentaire dans les écoles et par le biais des médias ; soutien aux défenseurs de la nutrition pour l’élaboration d’un système d’étiquetage des aliments ; mise en œuvre de l’obligation pour les fournisseurs des cantines scolaires de suivre une formation à la planification de repas sains. Au-delà des politiques, le gouvernement devrait également soutenir le développement d’une base de données sur la composition des aliments et l’élaboration de directives nutritionnelles pour promouvoir une alimentation saine. Un soutien à la recherche en matière de nutrition et de maladies d’origine alimentaire a été recommandé, ainsi qu’une surveillance et un suivi réguliers de l’environnement alimentaire.
Notre recherche a révélé l’influence importante de l’environnement physique et social sur les choix alimentaires. Nous avons également identifié, comme priorité pour les politiques gouvernementales, la législation et la réglementation de la promotion, du parrainage et de la publicité ciblant la nourriture et les boissons malsaines dans les quartiers, ce qui sera important pour améliorer les choix alimentaires et la santé dans les villes ghanéennes.
Remerciements
Le projet « Dietary transitions in Ghana » (transitions alimentaires au Ghana) a été financé par une subvention du programme de subventions concurrentielles de la Bill & Melinda Gates Foundation (Drivers of Food Choice – DFC) et le Département britannique du développement international (DFID), géré par la Arnold School of Public Health de l’Université de Caroline du Sud aux États-Unis. Le programme DFC soutient de nouvelles recherches sur la compréhension des choix alimentaires des populations pauvres dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, renforçant le leadership national en matière de nutrition et promouvant une communauté mondiale de chercheurs dans le domaine des choix alimentaires.
Le projet « Dietary transitions in Ghana » est mené par les universités de Sheffield, Loughborough et Liverpool au Royaume-Uni, l’Université du Ghana, Health and Allied Sciences et le Cirad – l’organisme français de recherche agronomique pour le développement. Plus de détails sur le projet sont disponibles sur le site : https://scharr.dept.shef.ac.uk/dfc/.
Le projet TACLED a été financé par un prix descerné par la Global Challenges Research Fund Foundation, dirigé par le MRC et soutenu par AHRC, BBSRC, ESRC et NERC, dans le but d’améliorer la santé et la prospérité des pays à revenu faible et intermédiaire.
Le projet « TACLED » (« Dietary Transitions in African Cities: Leveraging Evidence for interventions and policy to prevent Diet-related noncommunicable diseases » – Transitions nutritionnelles dans les villes africaines : exploiter les données pour des interventions et des politiques de prévention des affections non transmissibles d’origine alimentaire) est mené par les universités de Sheffield, de Loughborough, de Liverpool, et du Ghana, avec le African Population and Health Research Center, Kenya (APHRC). Plus de détails sur le projet sont disponibles sur le site : https://scharr.dept.shef.ac.uk/tacled
Nous voudrions remercier toutes les personnes à Ho et Accra qui nous ont généreusement accordé leur temps pour participer à nos études.
Contributeurs :
Fiona Graham, titulaire d’un doctorat en philosophie, associée de recherche à la School of Health and Related Research à l’Université de Sheffield. Elle est membre de l’équipe du projet sur les transitions alimentaires dans les villes ghanéennes et du projet TACLED.
Senam Klomegah, titulaire d’une maîtrise de philosophie, maître de conférences, École de santé publique, University of Health and Allied Sciences (UHAS) Ho. Elle est membre de l’équipe du projet sur les transitions alimentaires dans les villes ghanéennes.